Forum d’investissement pour la Grande Muraille Verte
11 janvier 2021: 10h-12h
L’INNÉ a assisté au One Planet Summit ce lundi 11 janvier 2021 et vous partage son relevé de notes intégral prises pendant les échanges.
L’objectif est d’arriver à un investissement de 10 milliards d’euros dans le capital naturel cette année. La Grande Muraille Verte (GMV) est une initiative africaine portée par les Africains. Elle n’a pas seulement pour vocation de planter des arbres mais également de restaurer les terres dégradées, de faire la paix avec la Nature, de contribuer à la transformation écologique et économique du Sahel, de fournir des emplois, d’arriver à une meilleure sécurité alimentaire et de créer des opportunités d’affaire en faveur des communautés rurales et locales.
La GMV repose sur 5 piliers d’action :
- l’investissement dans les petites et moyennes entreprises ;
- l’engagement dans des activités de restauration des terres et écosystèmes ;
- la création d’infrastructures résilientes au changement climatique et l’accès aux énergies renouvelables ;
- la gouvernance efficace visant à une meilleure stabilité, sécurité alimentaire, accès à l’emploi ;
- le renforcement de la capacité de déploiement des pratiques résilientes.
La crise sanitaire a créé des opportunités incroyable.
- Yannick Glemarec : Directeur du Fonds Vert pour le Climat (FV) :
Le monde n’est pas sur la bonne voie pour atteindre les Accords de Paris. La pauvreté et les conflits sont à la hausse. La GMV est un projet visionnaire pour développer la finance verte. Le Fonds Vert travaille sur la lutte contre le désertification et travaille actuellement à l’élaboration d’un programme pour accélérer le projet.
925 millions de dollar seront versés à la GMV.
- Gilbert Houngbo : Président du Fonds International du Développement Agricole (FIDA) :
Il y a un regain de mobilisation pour cette initiative visionnaire. En partenariat avec le Fonds Verts, le FIDA lancera un programme-cadre qui se situe dans les lignes des piliers de la Muraille Verte. La GMV va permettre de créer des opportunités nouvelles ; un renforcement des capacités techniques des acteurs locaux ; la création de 10 Millions d’emplois d’ici 2030. Ces avancées ne sont possibles que si dès aujourd’hui il y a une implication à l’échelle privée en tant qu’investisseurs mais aussi en tant que porteurs de savoirs-faire, d’innovations et de technologies.
Le FIDA va doubler ses investissements dans la GMV.
- Nicole Schwab – Codirectrice de la plateforme du Forum économique mondial (FEM) :
Il faut passer à une économie ayant un impact positif sur l’environnement, il faut reconcevoir l’économie. Le dernier rapport estime qu’une telle transition permettrait de générer 10 000 Milliards de dollars. Le FEM soutient les objectifs de la GMV avec :
- la mobilisation du secteur privé autour des chaînes de valeurs de l’agroforesterie ;
- l’identification de projets et modèles innovant à travers une plateforme qui permet de faire des proposition (avec notamment le lancement d’un challenge concernant la GMV) ;
- le soutien du mouvement des jeunes.
- Abdoulaye Dia – Secrétaire général de l’Agence panafricaine de la grande muraille verte (APGMV) :
Il salue la large coalition d’acteurs pour ce projet. Il faut un changement de paradigme et une approche dans la gestion des financements. Pour cela il faudrait l’harmonisation et la coordination des interventions multilatérales, la responsabilisation pleine et entière des États ainsi qu’un renforcement des capacités techniques de structure et une prise en compte de la soutenabilité de la dette des États membres.
L’idée est de concéder plus de 60 % des financements sous forme de dons et le reste sous forme concessionnelle. Il est temps que l’espace nourri ne soit pas vain, de passer enfin de l’espoir aux réalités concrètes et tangibles.
- Rémy Rioux – Directeur général de l’Agence Française de Développement (AFD) :
L’AFD a mobilisé 650 millions d’euros en faveur de projets contribuant aux objectifs de la GMV :
- promotion de l’agro-écologie ;
- projets de développement de territoires ruraux ;
- promotion des énergies renouvelables ;
- appui du pastoralisme ;
- mise en avant des acteurs locaux.
L’AFD mobilisera 600 millions d’euros dans les 5 prochaines années pour ce projet.
Elle souhaite se mobiliser pour que les banques publiques de développement viennent investir dans la grande muraille verte et mobiliser le secteur privé (banques internationales, banques régionales, banques nationales notamment agricoles).
- Werner Hoyer – Président de la Banque européenne d’investissement (BEI) :
Il faut investir dans beaucoup de domaines. La banque doit être alignée sur les Accords de Paris.
A partir d’aujourd’hui, la biodiversité a été ajoutée comme condition pour obtenir des obligations de la BEI. Il s’agit d’un exemple tangible de la manière dont la finance peut protéger le climat.
La cible est de mobiliser 1000 milliards d’euros dans les 10 années à venir pour soutenir les solutions technologiques nouvelles et compléter les sources de financement pour un impact positif sur l’environnement. La BEI soutient le projet de la GMV a hauteur d’1 milliard de dollars, l’idée étant :
- d’établir des actions pour une adaptation au climat et à la biodiversité ainsi qu’une protection des écosystèmes ;
- de permettre l’accès à l’eau potable dans cette zone ;
- de permettre une énergie propre ;
- de participer au projet du Burkina Faso pour éliminer l’impact du manque de pluviométrie ;
- de créer un fonds pour aider les projets de ce type.
Ces projets ont pour vocation d’améliorer la stabilité à long terme dans le Sahel. La BEI soutient toute mesure pour une coopération plus forte avec les banques, institutions financières et États du G5.
- Akinwumi Adesina – Président de la Banque africaine de développement (BAD) :
Il faut protéger l’environnement et la biodiversité. Ce mur protège notre existence collective. En le construisant, cela permettra une sécurisation du Sahel, une réduction des migrations et une amélioration des vies des populations. M. Adesina félicite l’initiative de la France et soutient ce projet.
La BAD va investir 20 millions de dollars pour aider à construire une station solaire (accès à l’énergie) pour la GMV.
La BAD mobilisera 6,5 milliards de dollars pour appuyer la GMV.
- Qu Dongyu – Directeur Général de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) :
Il y a un besoin d’une plus grande collaboration entre les communautés nationales, locales et des secteurs privés. Il faut des politiques innovantes, de nouveaux buisness model et davantage de capital des banques vertes.
La FAO et la CNUCED ont alors développé un plan d’action systématique à l’échelle des Nations unies. 238 millions de dollars seront investis pour appuyer les 5 piliers de la GMV et 1,15 milliards de dollars pour appuyer les 11 pays de la GMV dans le domaine agricole. Il s’agit d’une opportunité historique pour faire face au changement climatique.
- Brian Moynihan – Président du Conseil et Directeur général de la Banque d’Amérique ; coprésident de l’initiative du Prince de Galles du marché durable :
La banque souhaite créer une taxe carbone sur les opérations des entreprises. La Banque d’Amérique souhaite réduire sa consommation énergétique. De plus en plus d’organisations s’engagent pour la neutralité carbone et le lien entre financements traditionnels et sources de financements nouvelles peuvent être regroupés et permettre de mettre à projet des projets pouvant avoir un impact positif.
- Karim Ait Talb – Co-fondateur de « I am Africa » et Directeur général de Geocoton :
1 humain sur 4 vivra en Afrique à la fin du siècle. Il faut faire une révolution doublement verte. L’Afrique dispose de jeunes dynamiques. Il faut opérer un changement de paradigme urgent. L’Afrique n’a que trop vécu de crises. La Covid a rappelé les défis de développement que nous n’avons pas su rappeler. Cette crise doit être un déclencheur de consciences. Par exemple au Sahel, la majeure consommation de produits laitiers provient de poudres importées alors qu’il y aurait largement la capacité de produit sur place le lait avec le bétail local. L’agriculture est sous-estimée. I am Africa veut libérer le potentiel africain et s’engage à participer à la réalisation des objectifs 2030 de la GMV. Les entreprises privées sont prêtes à prendre leurs parts pour construire une nouvelle dynamique.
- Philippe Zaouati – Directeur général de Mirova :
Premier bilan de la GMV :
- de plus en plus de projets locaux et éthiques sont viables économiquement : identification de dizaines de projets de ce type ;
- de plus en plus de privés s’intéressent à ce projet (investissements privés), la bataille culturelle semble gagnée ;
- les grandes entreprises s’y intéressent avec notamment la contribution à hauteur de millions d’euros de l’Oréal.
Il est important de combiner l’argent public et privé mais il y a une insuffisance de coordination actuelle (parfois les exigences de rentabilité sont trop élevées pour le public, le privé doit se mettre à jour dans son intégrité notamment). Cela implique de construire un modèle sur la confiance et la rapidité d’exécution.
Mirova mobilisera un fonds autant que possible pour financer des projets contribuant à la GMV. Il est nécessaire d’incuber de nouveaux projets et c’est pourquoi Mirova annonce un projet d’incubation de 30 millions d’euros (déjà 8 millions ont été versés) et fait un appel à donateurs pour lancer ce fonds avant le congrès mondial de la Nature de Marseille 2021.
- Question/réponse :
Question : Quelles actions sont à entreprendre au niveau national pour mettre en œuvre les 5 piliers de cette GMV ?
Réponse : Pour se préparer à la Cop 26, les pays doivent avoir des plans de transition énergétique, ainsi que la capacité de prévoir les changements météorologiques (renforcement des capacités des pays en voie de développement pour qu’aient des centre météorologiques équipés). La commission de l’Union Africaine doit renforcer ses capacités des différents bassins.
- Mohameed Ould Cheick ould el Ghazouani – Président de la République islamique de Mauritanie :
La GMV est un instrument privilégié pour s’unir contre la désertification, contre la perte de la biodiversité et contre la dégradation des terres et du changement climatique. Elle permettra alors une meilleure sécurité alimentaire et énergétique, l’autonomisation des femmes et l’emploi des jeunes. Elle peut conduire au développement résiliant et durable.
La Mauritanie a procédé à la ratification de la convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification et inscrit dans sa stratégie de développement l’objectif qui vise à protéger ses écosystèmes terrestres.
L’objectif est débloquer 10 milliards de dollars sur la période 2021-2025 pour concrétiser les engagements des partenaires financiers. La mobilisation de ces financements contribuera certainement à atteindre les objectifs de la GMV qui vise la restauration de 100 millions d’hectares de terres dégradées et la création d’emplois verts.
M. le Président propose la création d’un fonds de la biodiversité dans lequel les États verserons une partie de l’annulation des dettes. Il invite les entreprises nationales et internationales à travailler en synergie pour soutenir le développement durable du Sahel et favoriser le transfert des technologies et savoirs faire aux États du Sahel ainsi qu’au déploiement de filières agroécologiques.
La Mauritanie a mené d’importantes réformes et notamment la promotion d’un partenariat public-privé et l’adaptation juridique aux standards internationaux et la mise à niveau des infrastructures pour l’accueil de la croissance.
- Emmanuel Macron – Président de la République française :
La France est engagée sur la sécurité de la région. Il faut donner un avenir aux populations en Afrique. Ce projet soulève un enjeu d’opportunité économique, de création d’emploi, d’alimentation des populations, de biodiversité et de lutte contre la désertification ainsi que de lutte contre le réchauffement climatique. Tous ces défis sont réconciliés dans la réponse que la GMV apporte. L’initiative a connu des hauts et des bas mais fait partie aujourd’hui des réponses à la région du Sahel et au continent africain. L’initiative d’aujourd’hui mobilise des financements publics et privés, elle met un coup d’arrêt au scepticisme. A l’échelle des 11 pays concernés, il faut accélérer le mouvement.
En réalisant les objectifs de l’initiative en 2030, il y aura une capacité de séquestre 200 millions de tonne de carbone et des millions d’emplois créés : il s’agit d’une contribution réelle et concrète du continent africain à lutte contre dérèglement climatique.
La Banque Mondiale a montré l’exemple en réalisant la moitié des objectifs. La France annonce une augmentation de 50 % de sa contribution au FIDA. 600 millions sont engagés par la France pour l’Afrique rurale. Il reste beaucoup à faire. Les États doivent avoir un agenda d’intensification et de simplification. Ce forum est une première étape. Ce qui est très important est de développer des solutions basées sur la Nature et d’autres sur la vitalité des écosystèmes des pays africains : 2 changements de paradigme très profonds.
L’agro-écologie renforce la nutrition des populations en respectant la biodiversité.
En mai se tiendra la conférence sur le financement de l’Afrique. Il faut être à la hauteur des engagements pris. Les États ont 9 ans pour réussir cette initiative. L’avenir des 11 pays et du continent africain sont en jeu. Il s’agit d’une formidable ambition.
Merci I.Woodall pour ce compte-rendu.